DEMANDES RÉCAPITULATIVES
Les Requérants demandent à la Cour constitutionnelle de dire et juger :
Article 1 : Que la présente requête est recevable ;
Article 2 : Que la Cour est compétente ;
Article 3 : Que le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 « entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine » est pris en violation de l’article 44 de la Loi portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle ;
Article 4 : Que le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 « entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine » viole ensemble les articles 41, 90, 152 et 153 de la Constitution du 30 mars 2022 ;
Article 5 : Qu’en conséquence ledit Décret est annulé.
L'INTÉGRALE DE LA REQUÊTE
RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
À l’attention de Madame la Présidente, de Mesdames et Messieurs les juges de la Cour constitutionnelle de la République Centrafricaine
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REQUÊTE EN ANNULATION ADRESSÉE À LA COUR CONSTITUTIONNELLE
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Bangui, le 14 septembre 2022
LES REQUÉRANTS ci-après, tous CITOYENS CENTRAFRICAINS :
- Pr Jean-François AKANDJI-KOMBÉ, Professeur à l’Université Paris 1, membre de la Coordination du G-16 et du Directoire de Citoyens Debout et Solidaires, Paris, France ;
- Karl BLAGUÉ, Sociologue consultant, membre de la Coordination du G-16, Bangui, RCA ;
- Ben Wilson NGASSAN, Expert en communication, membre de la Coordination du G-16, Bangui, RCA.
- Ludovic LÉDO, Conseiller en insertion professionnelle, membre de la Coordination du G-16, Bordeaux, France ;
- Sydney TCHIKAYA, Informaticien, membre de la Coordination du G-16, Yaoundé, Cameroun ;
- Anatole Alain CONGO-SIENNE, Administrateur, Cercle « ÉYÉTI-INGA », Reims, France ;
- Laurent GANDOLA, Informaticien, membre du Directoire de Citoyens Debout et Solidaires, Epinay-Sous-Sénart, France
- Mme Lydie NZENGOU, épouse KOUMAT-GUERET, Experte en communication, Cercle « ÉYÉTI-INGA », Le Mée Sur Seine, France ;
- Mme Rosalie POUZÈRE, Retraitée de Banque, membre du Directoire de Citoyens Debout et Solidaires, Paris, France.
Ayant pour Conseil : Maître Arlette SOMBO-DIBÉLÉ, Avocate au Barreau de Centrafrique, Avocat au Corps Spécial des Avocats près la CPS ;
Au Cabinet de qui ils ont élu domicile, Cabinet sis à Sica 3, Bangui, Tel (236)75503362 / 72480789, e-mail : Somboarlett@live.fr, Bangui, République Centrafricaine.
Ont l’honneur d’exposer :
Qu’ils déclarent formellement former un recours en annulation contre le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022, signé par le Président de la République, « entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine ».
I- EN FAIT
La majorité présidentielle lato sensu, en ce compris les organisations se présentant comme organisations de la société civile et soutenant le Président de la République, Son Excellence M. Faustin Archange TOUADÉRA, a résolu de réviser la Constitution du 30 mars 2016, puis de l’abroger purement et simplement au bénéfice d’une nouvelle Constitution, et ce à travers une série d’initiatives dont le Décret attaqué est l’une des premières concrétisations au plan du droit positif.
Ces initiatives se récapitulent comme suit :
Fin mars 2022, à l’occasion du « Dialogue républicain » convoqué par le Président de la République, les représentants de ladite majorité ont tenté, sans succès en raison de la mobilisation de la Société civile, de faire inscrire la modification de la Constitution de 2016 parmi les « recommandations fortes » adoptées in fine par les participants.
Immédiatement au sortir du « Dialogue Républicain », et pour conjurer cet échec, la plateforme dénommée « Front Républicain », dirigée par Héritier DONENG, lequel est par ailleurs le chef de la milice dénommée « Les Requins », lançait une pétition aux fins d’appeler à la révision de la Constitution.
Le 29 avril 2022, la pétition et les signatures, obtenues dans des conditions plus qu’équivoques, étaient remises au Vice-Président de l’Assemblée Nationale, M. Évariste NGAMANA.
Le 26 mai 2022, Un groupe de Députés conduit par M. Brice Kévin KAKPAYEN, Président de la Commission des Lois de l’Assemblée nationale, déposait sur le Bureau de ladite Assemblée une proposition de loi constitutionnelle.
L’objet de cette proposition était de réviser la Constitution du 30 mars 2016.
Selon la présentation que le Député KAKPAYEN en a fait le même jour, à l’hôtel LEDGER PLAZA de Bangui, cette proposition tendait à ce que soient modifiées et/ou complétées les dispositions de la Constitution dans les sens suivants, à titre principal :
- Levée de la limite du nombre de mandats du Président de la République, actuellement fixé à deux (2) ;
- Introduction de l’institution du Vice-président de la République ;
- Introduction d’une nouvelle condition d’éligibilité à l’élection présidentielle, tenant à la nationalité centrafricaine exclusive (exclusion des double nationaux) ;
- Modification de la durée du mandat du Bureau de l’Assemblée nationale ;
- Introduction d’une nouvelle composition du Sénat : en plus des Sénateurs désignés par les Maires, les anciens Premiers Ministres et les anciens Présidents des assemblées parlementaires seraient membres de plein droit ;
- Introduction d’une nouvelle institution, la Chambre de la Chefferie Traditionnelle ;
- Modification de la composition de la Cour constitutionnelle : les anciens Présidents de la République en deviendraient des membres de droit ;
- Abrogation des titres 10, 11, 12, 14 et 15 de la Constitution qui traitent des institutions républicaines.
Déclarée recevable par l’Assemblée nationale, la proposition de loi de révision a été transmise au Gouvernement.
Le 27 juillet 2022, le Conseil des Ministres extraordinaire réuni sur convocation du Président de la République a rendu son avis, sous le numéro 43MCSGRRIRIDIRCAB.22. Dans cet avis, il est fait état de ce que tout en prenant acte de l’initiative prise par l’Assemblée nationale, le Président de la République et le Gouvernement la jugent inappropriée compte tenu des verrous à la révision contenus dans la Constitution en vigueur, et choisissent plutôt la voie d’un changement de Constitution.
À partir de ce moment, les personnalités et organisations de la majorité présidentielle se sont mobilisées pour crédibiliser un soi-disant appel du Peuple et de ses Représentants en ce sens.
C’est ainsi que, sur le mot d’ordre du changement de Constitution, ont été organisées successivement, par les plateformes dénommées « Front Républicain » et « Galaxie Nationale » notamment, une marche de la communauté Peuhle à Bangui le 2 août 2022 à Bangui, et une autre marche non communautaire à Bangui ainsi que dans certaines villes de province le 6 août 2022.
Il importe de relever que pour parvenir à leurs fins les organisateurs de ces marches, soutenus par les autorités, ont usé de divers moyens ôtant tout caractère libre à ces manifestations : mobilisation sous de faux motifs (cas de la communauté peuhle, révélé par les interviews données à Radio Ndéké Luka par des participants à la marche), injonctions adressées aux agents publics, et rémunération des marcheurs (spécialement le 6 août).
C’est dans le même esprit que le Bureau de l’Assemblée nationale a conçu une lettre, adressée au Gouvernement le 10 août sous le numéro I70/AN/P, énonçant ce qui suit :
« Le Bureau de l’Assemblée Nationale, réuni le mardi 9 avril 2022 prend note de l’Avis du Gouvernement sus-référencé, relative à la proposition de Loi constitutionnelle complétant et modifiant les dispositions de la Constitution du 30 Mars 2016. Toutefois, le référant aux conclusions du Dialogue Républicain, les pétitions et marches de soutien organisées sur la quasi-totalité du territoire national, demande ou Gouvernement de déclencher une procédure référendaire en matière de réforme constitutionnelle. En conséquence, le Bureau exhorte le Gouvernement de mettre en place une Constituante ».
C’est dans ces conditions que, le 13 août 2022, le Président de la République, saisissant l’occasion de son discours à la Nation le jour de la commémoration de l’indépendance du pays, a lancé le signal de départ du changement de Constitution, en ces termes :
« Depuis le Dialogue républicain, de plus en plus de voix s’élèvent pour exiger la révision de la Constitution du 30 mars 2016.
La Représentation nationale, sensible aux aspirations profondes du peuple manifestées à travers des pétitions et marches de soutien à la réforme constitutionnelle, organisées sur l’ensemble du territoire, le 6 août 2022, par l’ensemble des forces vives de la Nation, vient de demander au Gouvernement de déclencher la procédure du référendum constitutionnel.
Oui, mes Chers Compatriotes, notre corpus juridique n’est pas immuable. Il doit s’adapter aux évolutions sociales, politiques, techniques et environnementales tant nationales qu’internationales.
En ce jour historique, je voudrais réaffirmer ma volonté de respecter la Constitution et la volonté du peuple souverain.
Comme j’ai eu à le réaffirmer en certaines circonstances, je ne ferai rien sans la volonté du peuple détenteur de la souveraineté nationale.
Cependant, je ne saurais demeurer indifférent aux cris de cœurs de mon peuple qui est dépositaire par excellence du pouvoir souverain.
Je vous ai écouté. Je prends acte de vos sollicitations pressantes qui me sont parvenues de partout réclamant une nouvelle Constitution ».
Le 26 août 2022, venant concrétiser juridiquement la volonté présidentielle d’abrogation de la Constitution du 30 mars 2016, est signé par le Chef de l’État et publié, sous le numéro 22.348, le Décret « portant création du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine ».
Par requête enregistrée au Greffe de la Cour constitutionnelle le 31 août 2022 à 15h15, onze (11) partis politiques membres du Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC) ont introduit un recours en annulation contre ce Décret, sur le fondement de l’article 95, tiret 1 de la Constitution.
En dépit de ce recours, un nouveau Décret est signé par le Chef de l’État et publié le 12 septembre 2022, sous le numéro 22.367, « entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine », Décret ayant pour fondement celui du 26 août 2022, précité.
C’est ce dernier Décret qui est ici attaqué.
II- EN DROIT
A- SUR LA COMPÉTENCE ET LA RECEVABILITÉ
1) Ratione personae
En conformité avec l’article 45 de la Loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, qui prévoit que « la saisine de la Cour Constitutionnelle peut se faire (…) par toute personne physique ou morale », la présente requête a pour auteur, comme il apparaît en première page, des citoyens centrafricains.
Elle remplit par conséquent les conditions ratione personae de la compétence de la Cour et de la recevabilité du recours.
2) Ratione materiae
Aux termes de l’article 95 tiret 1 de la Constitution :
« La Cour constitutionnelle est chargée de juger de la constitutionnalité des lois organiques et ordinaires déjà promulguées ou simplement votées, des règlements ainsi que des Règlements Intérieurs de l’Assemblée Nationale et du Sénat ».
Il est constant que l’acte attaqué a été pris en la forme d’un Décret du Président de la République, contresigné par le Premier Ministre et par le Ministre chargé du Secrétariat Général du Gouvernement et des Relations avec les Institutions de la République.
Il a ainsi le caractère d’un Règlement au sens de l’article 95 tiret 1 de la Constitution.
Partant, la Cour est compétente ratione materiae.
3) Ratione temporis
Aux termes de l’article 44 de la Loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle :
« Les ordonnances et les actes réglementaires peuvent être également déférés à la Cour Constitutionnelle qui en avise sans délai le Président de la République, le Premier Ministre et les Présidents des Chambres du Parlement. Ceux-ci, en informent les membres de leur Chambre.
La saisine intervient dans le mois de leur publication ».
Le Décret attaqué ayant été publié le 12 septembre 2022, la présente requête est introduite dans le délai prescrit.
Partant, elle est recevable.
B- SUR L’ANNULATION DU DÉCRET
1) À titre principal
L’article 47 de la Loi portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, relatif au contrôle de constitutionnalité des ordonnances et des actes règlementaires, prévoit que :
« L’enregistrement au Greffe de la requête fait courir le délai prévu à l’article 46 de la présente loi. Il suspend l’application de l’acte attaqué ».
Il résulte de ces dispositions, qui sont d’ordre public, que le recours en annulation dirigé contre un acte règlementaire a pour effet automatique d’en suspendre l’application.
Le Législateur a ainsi fait interdiction formelle à l’auteur d’un acte attaqué et à quiconque de lui donner une application juridique, c’est-à-dire à prendre des mesures juridiques pour sa mise en œuvre ou son exécution. Sont prohibés tout autant les actes matériels d’exécution.
En l’espèce, force est de constater que cette interdiction est méconnue de manière flagrante.
En effet, le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 est indiscutablement une mesure d’application du Décret attaqué devant la Cour constitutionnelle par les partis politiques au moyen de la requête du 30 août 2022.
Outre son objet, ceci s’infère nécessairement du fait que le Décret ici attaqué, celui du 12 septembre 2022, trouve son fondement dans celui du 26 août 2022, qui faisait au moment de son adoption, l’objet d’une requête devant la Cour, ce qui est formellement confirmé par le fait que dans les visas du Décret visé par la présente requête se trouve expressément cité celui précédemment contesté devant la Cour par les partis politiques.
Il y a ainsi, application juridique indéniable d’un décret attaqué devant la Cour constitutionnelle (le Décret du 26 août 2022).
Mais ce n’est pas tout.
Il y a eu aussi application matérielle dudit décret. En effet, pour parvenir au Décret du 12 septembre, des opérations ont été conduites pour la désignation des représentants des entités visées par le Décret du 26 août, et ceci généralement à l’instigation et/ou sous la supervision officieuse de la Présidence de la République.
Or, force est de constater que la plupart de ces opérations ont été réalisées après le 30 août 2022, date de la saisine de la Cour par les Partis politiques. Il en a été ainsi, par exemple, pour la désignation des représentants de l’Université de Bangui, dont le processus de désignation s’est déroulé après le 30 août, ainsi que pour la réunion de désignation des membres du Conseil National de la Jeunesse (CNJ), Assemblée générale extraordinaire de cette entité, tenue le 1er septembre 2022.
La Loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, prise en son article 44 est violée.
Le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 « entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine » sera en conséquence annulé.
2) À titre subsidiaire
Si la Cour venait entretemps à annuler le Décret du 26 août 2022, elle ne pourra qu’annuler, par voie de conséquence, le Décret du 12 août pour défaut de base juridique.
En effet, privé ainsi de tout fondement juridique, puisque la Constitution elle-même ne contient aucune disposition habilitant le Président de la République à instituer pareil Comité et, partant, à en nommer ou entériner la désignation des membres, le Décret du 12 septembre n’aurait plus aucune validité juridique et donc aucune justification à demeurer dans l’ordonnancement juridique centrafricain.
De plus, parce que ce Décret, tout comme celui qui aura été annulé, a pour objet de réécrire les dispositions de la Constitution, il viole :
- Ensemble, les dispositions du Titre XV de la Constitution du 30 mars 2016, consacrées à la révision, en ce que la procédure initiée tend à évincer la procédure formelle de révision ;
- L’article 152, paragraphe 1 de la Constitution, en ce que l’Assemblée nationale n’a pas compétence, seule, en l’absence du Sénat, pour initier ou adopter un projet de Loi constitutionnelle ;
- L’article 152, paragraphe 2 de la Constitution, en ce qu’il interdit toute révision de la Constitution lorsqu’il est porté atteinte à l’unité et à l’intégrité du territoire, ce qui est précisément le cas en République Centrafricaine à ce jour ;
- L’article 153 de la Constitution, en ce qu’il interdit de réviser la forme républicaine et laïque de l’État, le nombre et la durée des mandats présidentiels, les conditions d’éligibilité, les incompatibilités aux fonctions de Président de la République, les droits fondamentaux du citoyens et les dispositions de cet article 153, tous éléments que précisément le Comité objet du Décret attaqué est appelé à modifier ;
- Et, potentiellement, les articles 41, 90 et 152, paragraphe 1 de la Constitution qui prévoient le référendum, en ce que, d’une part, les référendums des articles 41 et 90 sont prescrits par la Constitution pour l’adoption de lois simples et non de lois constitutionnelles et que, d’autre part, le référendum de l’article 152 est expressément et exclusivement réservé à la révision de la Constitution et non prévue pour le cas de changement de Constitution ; autrement dit, en ce que l’adossement du référendum à ces dispositions constitue un flagrant détournement de procédure, contraire à la Constitution.
L’annulation du Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 est ainsi encourue de manière certaine.
AU VU L’ENSEMBLE DES ÉLÉMENTS QUI PRÉCÈDENT,
Les Requérants demandent à la Cour constitutionnelle de dire et juger :
Article 1 : Que la présente requête est recevable ;
Article 2 : Que la Cour est compétente ;
Article 3 : Que le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 « entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine » est pris en violation de l’article 44 de la Loi portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle ;
Article 4 : Que le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 « entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine » viole ensemble les articles 41, 90, 152 et 153 de la Constitution du 30 mars 2022 ;
Article 5 : Qu’en conséquence ledit Décret est annulé.
Fait à Bangui le 14 septembre 2022
Pour les Requérants
Maître Arlette SOMBO-DIBÉLÉ
LE MÉMOIRE COMPLÉMENTAIRE
RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
À l’attention de Madame la Présidente, de Mesdames et Messieurs les juges de la Cour constitutionnelle de la République Centrafricaine
*
MÉMOIRE ADDITIONNEL À LA REQUÊTE N° 026 DU 14 SEPTEMBRE 2022 VALANT EN TOUT ÉTAT DE CAUSE RECOURS EN ANNULATION CONTRE LE DÉCRET N° 22.372 DU 14 SEPT. 2022
_____
Bangui, le 15 septembre 2022
LES REQUÉRANTS ci-après, tous CITOYENS CENTRAFRICAINS :
- Pr Jean-François AKANDJI-KOMBÉ, Professeur à l’Université Paris 1, membre de la Coordination du G-16 et du Directoire de Citoyens Debout et Solidaires, Paris, France ;
- Karl BLAGUÉ, Sociologue consultant, membre de la Coordination du G-16, Bangui, RCA ;
- Ben Wilson NGASSAN, Expert en communication, membre de la Coordination du G-16, Bangui, RCA.
- Ludovic LÉDO, Conseiller en insertion professionnelle, membre de la Coordination du G-16, Bordeaux, France ;
- Sydney TCHIKAYA, Informaticien, membre de la Coordination du G-16, Yaoundé, Cameroun ;
- Anatole Alain CONGO-SIENNE, Administrateur, Cercle « ÉYÉTI-INGA », Reims, France ;
- Laurent GANDOLA, Informaticien, membre du Directoire de Citoyens Debout et Solidaires, Epinay-Sous-Sénart, France
- Mme Lydie NZENGOU, épouse KOUMAT-GUERET, Experte en communication, Cercle « ÉYÉTI-INGA », Le Mée Sur Seine, France ;
- Mme Rosalie POUZÈRE, Retraitée de Banque, membre du Directoire de Citoyens Debout et Solidaires, Paris, France.
Ayant pour Conseil : Maître Arlette SOMBO-DIBÉLÉ, Avocate au Barreau de Centrafrique, Avocat au Corps Spécial des Avocats près la CPS ;
Au Cabinet de qui ils ont élu domicile, Cabinet sis à Sica 3, Bangui, Tel (236)75503362 / 72480789, e-mail : Somboarlett@live.fr, Bangui, République Centrafricaine.
Ont l’honneur d’exposer :
Qu’ils déclarent formellement que le présent mémoire vise à compléter la requête n° 026 introduite par eux devant la Cour le 14 septembre, et donc à étendre la demande d’annulation au Décret n° 22.372 du 14 septembre 2022, publié le 15 septembre, « modifiant et complétant certaines dispositions du Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine ».
Qu’en tout état de cause le présent mémoire additionnel vaut recours en annulation contre ledit décret n° 22.372 du 14 septembre 2022.
I- EN FAIT
Croyant pouvoir neutraliser les effets de la requête en annulation introduite par les Requérants le 14 septembre contre le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine, et enregistrée au Greffe de la Cour sous le numéro 026, le Président de la République s’est empressé de signer un nouveau Décret, daté du 14 septembre 2022, mais publié seulement le 15 septembre.
Ce nouveau Décret est, lui aussi contresigné par le Premier Ministre et par le Ministre chargé du Secrétariat Général du Gouvernement et des relations avec les Institutions de la République.
Ledit Décret a pour objet de modifier et de compléter certaines dispositions du Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022, signé par le Président de la République, entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine.
Les Requérants demandent à la Cour de considérer ce Décret comme attaqué, conjointement au Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022, par la requête n° 026 du 14 septembre, complétée par les présentes.
II- EN DROIT
Le Décret n° 22.372 du 14 septembre 2022 vise, comme son intitulé en atteste, à modifier et à compléter celui du 12 septembre.
Il suit de là, d’une part, que le Décret du 12 septembre doit être regardé comme étant toujours en vigueur et, d’autre part, que le Décret du 14 septembre fait corps avec celui du 12 septembre.
De sorte que les arguments et conclusions énoncés dans la requête n° 026 du 14 septembre 2022 valent mutatis mutandis en ce qui concerne aussi ce nouveau Décret, s’agissant tant de la recevabilité du recours, de la compétence de la Cour que du bien-fondé de la requête.
Les Requérants se permettent par conséquent de renvoyer la Cour à cette requête, en demandant à la Haute juridiction de considérer qu’à chaque fois qu’il y est fait mention du « Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine », cela doit être lu ainsi :
« Le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine et le Décret n° 22.372 du 14 septembre 2022 modifiant et complétant certaines dispositions du Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine.
Autrement dit la Cour est invitée à considérer que le recours en annulation des Requérants est dirigé solidairement contre le Décret du 12 septembre et le Décret du 14 septembre.
AU VU L’ENSEMBLE DES ÉLÉMENTS QUI PRÉCÈDENT,
Les Requérants demandent à la Cour constitutionnelle de dire et juger :
Article 1 : Que la présente requête est recevable ;
Article 2 : Que la Cour est compétente ;
Article 3 : Que le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine ainsi que le Décret n° 22.372 du 14 septembre 2022 modifiant et complétant certaines dispositions dudit Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 sont pris en violation de l’article 44 de la Loi portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle ;
Article 4 : Que le Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 entérinant la désignation des membres du Comité chargé de rédiger le projet de la Constitution de la République Centrafricaine et le Décret n° 22.372 du 14 septembre 2022 modifiant et complétant certaines dispositions dudit Décret n° 22.367 du 12 septembre 2022 violent, ensemble, les articles 41, 90, 152 et 153 de la Constitution du 30 mars 2022 ;
Article 5 : Qu’en conséquence les deux Décrets sont annulés.
Fait à Bangui le 15 septembre 2022
Pour les Requérants
Maître Arlette SOMBO-DIBÉLÉ
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