ENJEUX.
Les dysfonctionnements des juridictions du travail, et tout spécialement de la juridiction prud’homale, sont notoires : lenteur des procédures (entre 15 et 27 mois entre la saisine et le jugement), taux d’appel élevés (concerne environ 60% des décisions, contre 10 à 15% pour les autres juridictions civiles), inadaptation manifeste de la procédure de conciliation, problème de compétence juridique des juges, manque de moyens matériels et humains, etc.
Ce sombre tableau est à l’origine de la mission confiée par la Garde des Sceaux à Monsieur Alain Lacabarats, alors Président de la Chambre sociale de la Cour de cassation. Comme souvent, l’Europe, celle du Conseil de l’Europe et de la Convention européenne des droits de l’homme, ont grandement aidé à rendre impérieuse une réflexion urgente sur les réformes à faire, en condamnant de manière répétée l’Etat français à raison des dysfonctionnements de sa juridiction du travail.
Le rapport remis à la Garde des Sceaux ce 16 juillet 2014, et intitulé “L’avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud’homal du 21e siècle”, s’inscrit dans une perspective immédiate, et on peut penser, compte tenu du bel accueil qui lui a été fait par sa commanditaire, que cette perspective n’est pas irréaliste.
PROPOSITIONS.
Les pistes de réforme en vue d’une amélioration de la juridiction prud’homale sont déclinées en 45 propositions solidement argumentées. Cela invite, après avoir pris connaissance de ces propositions, à lire le rapport lui même (télécharger…Rapport_Lacabarats_2014)
- Proposition n° 1 : Le conseil des prud’hommes devient le tribunal des prud’hommes, où siègent des juges prud’homaux.
- Proposition n° 2 : Intégrer dans le code de l’organisation judiciaire et dans le code de procédure civile les textes relatifs à l’organisation, à la procédure et au fonctionnement de la juridiction prud’homale.
- Proposition n° 3 : Clarifier les rôles respectifs des ministères de la justice et du travail : au premier l’organisation, le fonctionnement et les procédures au second l’élection ou la désignation des juges, les règles de fond et les relations avec les partenaires sociaux.
- Proposition n° 4 : Permettre un accès sécurisé aux ressources de l’intranet justice.
- Proposition n° 5 : Prévoir des rencontres régulières entre les juges prud’homaux et les juges départiteurs, le TGI et la cour d’appel.
- Proposition n° 6 : Renforcer le contrôle par les chefs de cour et le rôle du parquet.
- Proposition n° 7 : Revoir la carte des juridictions prud’homales sur la base des bassins de population et d’emploi.
- Proposition n° 8 : Fixer les effectifs de juges en rapport avec le nombre de décisions à rédiger.
- Proposition n° 9 : Introduire de la souplesse dans le fonctionnement des sections.
- Proposition n° 10 : Appliquer par principe aux juges prud’homaux les règles relatives aux droits et obligations des juges.
- Proposition n° 11: Rendre obligatoire pour les juges prud’homaux une formation initiale et continue, pour partie commune, sous l’égide de l’ENM, avec le concours de l’ENG.
- Proposition n° 12 : Améliorer l’indemnisation pour le temps de préparation des audiences de conciliation.
- Proposition n° 13 : Fixer des principes déontologiques analogues à ceux des juges professionnels.
- Proposition n° 14 : Prévoir une procédure disciplinaire comparable à celle des juges professionnels.
- Proposition n° 15 : Faire du Conseil supérieur de la prud’homie l’organe statutaire des juges prud’homaux.
- Proposition n° 16 : Confier à un vice-président du TGI l’ensemble du contentieux du travail, en formation collégiale ou en juge unique selon les cas.
- Proposition n° 17 : Assurer aux juges du fond une spécialisation valorisée en droit du travail.
- Proposition n° 18 : Augmenter le nombre de conseillers en service extraordinaire susceptibles d’être affectés à la chambre sociale de la Cour de cassation.
- Proposition n° 19 : Revoir la répartition des compétences entre ordres juridictionnels sur certains sujets croisés.
- Proposition n° 20 : Instaurer une procédure de question préjudicielle entre les deux juridictions suprêmes des ordres administratif et judiciaire.
- Proposition n° 21 : Créer la possibilité d’actions collectives devant le TGI.
- Proposition n° 22 : Permettre le regroupement des dossiers posant des questions similaires.
- Proposition n° 23 : Instaurer une demande d’avis à la chambre sociale de la Cour de cassation pour l’interprétation des conventions collectives.
- Proposition n° 24 : Réformer les conditions de saisine du tribunal des prud’hommes.
- Proposition n° 25 : Exiger du défendeur un effort de communication préalable à l’audience en cas de preuve partagée.
- Proposition n° 26 : Informer les parties sur le lien entre l’instance et les droits de Pôle emploi et permettre la délivrance lors de l’audience d’une attestation aux fins d’inscription à Pôle emploi.
- Proposition n° 27: Assurer aux justiciables une information de qualité.
- Proposition n° 28 : Transformer le bureau de conciliation en bureau de conciliation et d’orientation (BCO).
- Proposition n° 29 : Enrichir les pouvoirs du bureau de conciliation en matière de règlement amiable des litiges.
- Proposition n° 30 : Sécuriser la conciliation en établissant un document Cerfa à cet effet.
- Proposition n° 31 : Réaffirmer le pouvoir du BCO de prendre toute mesure d’injonction, de condamnation provisionnelle ou d’instruction.
- Proposition n° 32 : Donner le pouvoir au BCO de délivrer une décision valant attestation Pôle emploi.
- Proposition n° 33 : Permettre le renvoi immédiat au juge départiteur.
- Proposition n° 34 : Prévoir le jugement immédiat de l’affaire par le BCO en cas d’absence injustifiée du défendeur.
- Proposition n° 35 : Instaurer une véritable mise en état.
- Proposition n° 36 : Réaffirmer les obligations en matière d’audience et de délibéré.
- Proposition n° 37 : Réaffirmer le pouvoir des chefs de cour de surveiller le fonctionnement des tribunaux des prud’hommes.
- Proposition n° 38 : Limiter, lors de l’audience de départage, les causes de remplacement des juges prud’homaux aux cas d’empêchement légitime.
- Proposition n° 39 : Rendre obligatoire devant la cour d’appel la représentation par avocat ou par défenseur syndical.
- Proposition n° 40 : Créer un statut des défenseurs syndicaux.
- Proposition n° 41 : Adopter une procédure écrite devant la cour d’appel.
- Proposition n° 42 : Aménager l’unicité de l’instance.
- Proposition n° 43 : Supprimer les dispositions du code du travail relatives à la péremption d’instance pour aligner celle-ci sur le droit commun.
- Proposition n° 44 : Créer un circuit court simplifié pour certains litiges.
- Proposition n° 45 : Conclure des contrats d’objectifs dans les juridictions en difficulté.
One comment on “L’avenir des juridictions du travail : les 45 propositions du Rapport Lacabarats”
la proposition n°1 ne sert strictement à rien
la n°2 complique un seul ministère suffit
la n°6 ne doit porter que sur les délais de jugement qui doivent être limités dans le temps notamment pour les affaires simples qui ne posent aucune discussion juridique sérieuse
la n°12 il vaudrait mieux exclure le principe de l’indemnisation pour la remplace par la “rémunération ” des juges qui doit être alignée sur celle des “juges” des tribunaux
la n°16 revient à retirer aux juges élus leur pouvoir de juger ce qui est une proposition corporatiste
les n°28 à 32, les BCO règlent très peu de litiges, ils font perdre beaucoup de temps, ils devraient être supprimés et remplacés par l’obligation du bureau de jugement de proposer une médiation, ce qui fait gagner 6 mois dans l’attente de l’audience de jugement.
la n°33 reste un voeu pieu à PARIS délai d’attente devant le juge répartiteur 1 an au lieu d’un mois prévu par la procédure !
la n°34 est dangereuse pour les droits de la défense
la n°35 suppose des audiences supplémentaires de mise en état qui rallongent les délais de jugement
la n°39 est injustifiée, elle ajoute un obstacle financier, un accès limité au juge d’appel, la cour est juge du fond comme le tribunal où la représentation n’est pas obligatoire, que dire des justiciables juristes par exemple dont les compétences n’ont rien à envier et ne nécessitent aucun intermédiaire