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Conférence à l’Institut d’Etudes Avancées de Nantes, suite : canevas d’intervention

IEA de Nantes, 9 décembre 2014

Les droits sociaux et le droit européen : d’aujourd’hui à demain (résumé) 

IEA-Nantes-affiche-de-la-conference-du-prof-akandji-kombeL’Europe se trouve aujourd’hui à un carrefour en ce qui concerne la place à accorder aux droits sociaux dans les ordres juridiques européens à vocation globale, autant que dans les ordres juridiques nationaux.

L’exacerbation de la logique économique du marché pour répondre à la crise économique et financière ainsi qu’à la crise des dettes souveraines, la remise en cause profonde des liens de solidarité qu’elle a entraîné, mais aussi des mécanismes de protection, ont fini par provoquer une demande de plus en plus forte non seulement de droits sociaux, mais de droits sociaux effectifs. Il y a là, selon nous, non seulement, un défi pour l’Europe juridique de demain, mais aussi un enjeu fort de redéfinition de l’identité politique de cette Europe, ainsi que de sa stratégie économique.

On ne peut cependant mesurer l’importance et la signification de ce défi qu’en retraçant, pensons-nous, l’histoire des droits sociaux sur le continent. Le terrain choisi pour retracer cette histoire sera le droit, que l’on prendra cependant garde à ne pas considérer pour lui-même mais dans sa relation avec la société qu’il re-présente.

L’hypothèse dont on partira est que les droits sociaux, en tant que construction juridique exprimant les nécessités de protection de l’être social, constituent un point de réflection du droit européen dans son ensemble, des valeurs qui en sont le soubassement et qui l’animent ; que leur destin juridique, destin de (non)reconnaissance et/ou destin de (non)protection, possède une signification par delà le droit.

Afin de permettre la meilleure compréhension possible de « l’aujourd’hui », on commencera par l’histoire, « les droits sociaux dans la construction européenne » en somme : où l’on se penchera sur la fondation des Europes, l’Europe communautaire et celle du Conseil de l’Europe ; et où l’on tentera de prendre la mesure des vicissitudes des droits sociaux à travers les avancées de ces édifications européennes.

Ce socle de compréhension établi, on s’arrêtera au présent : pour constater qu’il est à la fois ambitieux et pluriel dans les textes consacrant les droits sociaux ; qu’il apparaît contrasté et, dans une large mesure, rétif aux droits sociaux dans l’application de ces textes, menacé de risque de blocage à force de contradictions.

Puis on s’attachera à évoquer l’avenir, incertain par définition, en insistant tout particulièrement sur l’importance de la volonté politique. La récente Conférence de Turin (17-18 octobre 2014) servira de trame à cette esquisse d’avenir.

Plan (trame) de l’exposé 

Introduction :

  • Les droits sociaux, un essai de définition
    • Du droit social, à l’OIT, aux droits sociaux
    • Les droits sociaux sont des droits de l’homme, prérogatives attachées aux personnes soit en raison d’une position située de travailleur, soit à raison d’une identité d’être social, gouvernée par les valeurs de dignité (dimension individuelle) et de solidarité (dimension collective).
  • Le droit européen, ses contours et ses subdivisions
    • Le droit européen s’est constitué en deux pôles, aux logiques séparées
    • La logique de construction d’un espace politico-juridique d’Etats souverains : le Conseil de l’Europe
    • La logique de construction d’un espace économique (marché) intégré et supranational (l’Union européenne).

Histoire : les droits sociaux dans la construction européenne

  • Les droits sociaux et la fondation de l’Europe : histoire d’une non-rencontre
    • L’héritage oublié d’un monde qui se construit autour de l’idéal d’une paix par la justice sociale
      • Du Pacte de la Société des Nations à la Déclaration de Philadelphie : la paix par la justice sociale
      • La déclaration universelle des droits de l’homme : l’indivisibilité des droits de l’homme
    • Figures de l’oubli au cours de la phase de fondation du Conseil de l’Europe
      • L’élaboration de la Convention européenne des droits de l’homme et l’exclusion des droits sociaux
      • Le destin contrarié de la Charte sociale européenne
    • Figures de l’oubli au cours de la phase de création des Communautés européenne
      • Une Europe communautaire sans droits sociaux, ou avec des droits sociaux économiquement finalisés (l’exemple de la libre circulation de travailleurs considérés comme simples facteurs de production)
      • Mais aussi une Europe communautaire sans droits de l’homme (on parle alors de déficit démocratique et des droits fondamentaux).
    • Les droits sociaux et le déploiement de la construction européenne : la timide avancée (reconnaissance sans effectivité)
      • Des communautés européennes à l’Union européenne
        • La consécration contrainte des droits fondamentaux par la Cour de justice des communautés à l’orée des années 70 : droits fondamentaux mais pas droits sociaux
        • La consécration sans conséquences des droits sociaux dans les textes (La déclaration des droits fondamentaux du Parlement européen, la Charte des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, et les références aux droits fondamentaux dans les traités constitutifs)
      • Le Conseil de l’Europe
        • La Charte sociale européenne (1961) et ses difficultés de mise en œuvre
        • La difficile reconnaissance des droits sociaux par la Cour européenne des droits de l’homme (années 70 et 80)

Aujourd’hui : Du renouveau des droits sociaux dans les textes à leur neutralisation dans la pratique

  • Le renouveau
    • Dans le système de la Charte sociale européenne : le processus de « Relance » de la Charte [nota bene : renouveau faisant suite à l’échec du projet de mise en place d’une juridiction européenne des droits sociaux]
    • Dans le système de l’Union européenne : adoption de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne au sommet de Nice (2000) et son entrée en vigueur avec le Traité de Lisbonne (2007).
  • La neutralisation relative
    • La neutralisation, version Union européenne
      • Les limites textuelles à la portée effective de la Charte des droits fondamentaux de l’UE
      • La jurisprudence de la CJUE : des arrêts Laval et Viking (2007) à l’arrêt Association de médiation sociale (2014) ainsi qu’aux décisions relatives aux mesures anti-crise (2013-2014)
    • La neutralisation, version Cour européenne des droits de l’homme
      • Du renouveau de la jurisprudence relative aux droits sociaux…
      • … à la rétractation face aux mesures d’austérité dites anti-crise (2013)
    • L’affirmation « provocatrice » des droits sociaux par le Comité européen des droits sociaux
      • Les « décisions grecques » (2012 et s.)
      • La décision « anti-laval » – LO et TCO c. Suède (2013)

Demain : La nécessité d’une refondation de l’Europe à partir des droits sociaux ?

  • Un frémissement : la conférence de Turin d’octobre 2014
    • Les origines de la conférence et ses objectifs
    • Les propositions faites à la conférence
      • Réactions politiques et institutionnelles
      • Propositions du Réseau académique européen
      • Les suites de la conférence de Turin
    • Les enjeux
      • Inscrire les droits sociaux au cœur des politiques économiques
      • Donner à la « société démocratique européenne » une dimension sociale

Jean-François Akandji-Kombé, Professeur à l’École de Droit de la Sorbonne, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Coordinateur général du Réseau académique européen sur les Droits sociaux

Conférence IEA 12-2014

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